La brute et l'érudit [pv Lutostran]

Ne dites pas que cela soit de l’obsession, ou pure folie. J’en avais plus qu’assez d’entendre pareille sottise de la part des autres. Est-ce que le monde était devenu ignare et poltron à ce point ? Oui ! Je revenais tout juste d’une nouvelle expédition, et encore, certains diront qu’il s’agissait d’un échec cuisant. Mais contrairement à la plupart de ces êtres peuplant notre continent, je ne comptais pas baisser les bras. Ça non ! À présent, j’eus ouï dire d’une chose ayant bien plus d’importance que toutes ces babioles que j’eus à chercher jusqu’à présent. Certes, cela ressemblait plus à de la légende ou à un attrape pigeon. Mais pour pouvoir le dire, il fallait que j’aille le voir et que je puisse l’étudier.

Voilà pourquoi je me retrouvais dans une charrette, me conduisant à destination. La quelle ? Celle d’un village pittoresque à la frontière des Ganavarelles. Non loin de chez moi, une chance. Au moins, cela m’évitait de devoir une fois de plus, traverser tout Orcande et me perdre au milieu de montagnes ou dans les forêts les plus hostiles. Y allais-je seul ? Eh bien, en temps normal, je serais allé là-bas avec quelques hommes, quelques gardes du château. Mais suit à notre dernière expédition, presque tous furent à bout et avait besoin de se reposer et revoir leur famille. Soit, je pensais pouvoir profiter de ce moment pour travailler seul, mais ma famille désirait tant que je sois escorté.

Ainsi, au lieu de partir en mission avec quelques gardes, c’était avec un mercenaire que je me retrouvais. Le choix ne s’était pas fait par le plus grand des hasards, c’était par sélection. Enfin, de ce que j’avais compris. Car mon critère principal fut qu’il ne me dérangeait pas dans mon travail. Pour le reste, je laissais mes gens gérait la chose, et voilà pourquoi je voyageais avec un dénommé Lustucru, ou Lustogan… Enfin, quelque chose dans le genre.

Pendant le voyage, je sortais le parchemin de mon sac qui informait de l’objet de ma quête. Tout cela semblait bien trop beau, je voulais l’accorder. Mais si cela était vrai, il fallait que j’aille voir. Et dans le cas contraire, je pourrais dénoncer l’affreuse escroquerie sur la place publique, rendre justice ainsi et rentrer chez moi, rageant comme souvent.

"Nous devrions arriver à destination en début de soirée." Disais-je à mon protecteur de mercenaire, sans lui accorder le moindre regard, bien trop occuper à étudier le document.

J’espérais que moins que ce dernier sera se montrer aussi efficace qu’on le disait. Bon, s’il y avait une bagarre qui se déclencherait, je pourrais y participer. Toutefois, s’il parvenait à s’occuper sans problème de tous les malabars, ceci me rendrait un immense service. Car je gagnerais du temps pour continuer à étudier. Même si je trouvais son aspect quelque peu étrange, il ne m’évoquait en rien un puissant guerrier, j’étais bien placer pour savoir qu’il ne fallait jamais se fier aux apparences. Alors, accordons-lui le bénéfice du doute. Et si tout se passait comme je le présageais, alors nous n’aurions même besoin de sortir nos armes et frapper qui que ce soit.

Pour tout vous dire, le mercenaire me fit un drôle d’effet. Il semblait bien être un bon vivant certes, mais je lui trouvais un rien vantard. Après tout, un mercenaire devait savoir se vendre, et j’espérais que le spectacle s’arrêterait à la présentation. Discret disait-il ? Nous verrons bien cela. Hors de question qu’il se mette à brailler au milieu de tout le monde et n’attire l’attention de personnes peu scrupuleuses. Mon travail impliquait calme et sérieux. Si je devais le voir pousser la chansonnette bière à la main, je ne voudrais pas venir à brûler tout le village. Après tout, la quête stipulait juste d’aller voir quelqu’un, écouter ce qu’il avait à me dire, et rentrer. Que pouvait-il donc nous arriver ?

Pour le reste du voyage, je préférais rester concentrer sur mes maigres informations. Leurs études ne m’apporteraient rien, mais à la manière d’une propagande, elles promettaient du rêve. Est-ce que tout cela allait enfin me mener face à un dragon ? Que je pourrais étudier et permettre à la magie d’avoir un nouveau visage ? Après toutes ces années de recherches, ce serait trop beau.

La luminosité du ciel décroissait peu à peu. Signe que nous ne tarderons pas à rejoindre ce village un peu perdu. On m’avait assuré qu’il s’y trouvait une auberge pour les voyageurs. Sinon, dormir à la belle étoile ne me posait pas de problème, mais le risque de se faire voler demeurait. Nous verrons de toute façon, les compétences de notre nouvel ami. Vu « l’attachement » des gens du château, je supposais qu’il était tout de même bon. Mais si je cru comprendre, qu’il n’était pas aussi expérimenté qu’on pouvait le croire.

Sans doute aurais-je dû demander au départ, mais l’envie de partir au plus vite et ne pas vouloir être surveillé par une nourrice fut bien forte.

"Sinon, vous avez déjà fait ce genre de mission je suppose. Escorter et protéger… Je vous rappelle que je demande du propre et pas une bavure compris ?"

Après, je faisais confiance en mes compétences. Toutefois, un petit coup de main ne serait pas de refus. Cependant, ma principale crainte demeurait la même. Ne pas voir cet inconnu tout gâcher par un manque de professionnalisme. Me faisais-je des idées ? Je l’espérais bien. Car jusqu’à maintenant, la plupart de mes collaborateurs durent subir mon lourd jugement qui était « incompétents ! » Parfois, je soupçonnais du sabotage, ce qui renforçais ce que vous appeliez « Mon obsession ! »

Mais je n’étais pas pour autant un ingrat. Quand mes recherches aboutiront, je n’oublierais pas de félicités chaque personne ayant contribué. Qu’il soit érudit, herboriste, paysan ou même mercenaire, ceux m’ayant aidé seront gracieusement récompenser. Mais si justement, ils venaient à me nuire, qu’ils gâchaient intentionnellement ou non mes travaux, alors, ils verront tous en vrai, la colère d’un dragon…

Notre charrette s’arrêta brutalement en cours de route, faisant trembler l’engin que ses passagers. Les chevaux se mirent à hennirent comme si une bête sauvage leur faisait peur. Me retournant vers le cocher, étant à la fois inquiet et énerver, je demandais :

"Que ce passe t’il, pourquoi cet arrêt ?"
"Le pont pour traverser s'est effondrer. On va devoir contourner."

Merveilleux ! Nous allons prendre du retard, magnique…

Le mercenaire se voulait rassurant, et j’ignorais s’il était sérieux en disant qu’il arriverait à me protéger. Enfin bon, il fallait bien se vendre et justifier le fait d’être engagé. Mais je notais qu’il ne m’avait pas réellement répondu. Était-il accoutumé pour ce genre de tâche ? Je voulais bien admettre qu’il y avait un début à tout, une première fois, mais j’aurais aimé que ce genre de chose, ne tombait pas au moment où je demandais de l’aide. Enfin bon, nous verrons bien ce que les dieux nous ont réserver comme surprise.

Et comme surprise, nous avons eut droit à la première avec ce point affaissé. Et si je devais donner un compliment à mon compagnon de voyage, ce serait qu’il soit loin d’être benêt. Un raisonnement qui me paraissait intelligent et qui au final, commençait à me rassurer sur le choix du personnel.

"Vous avez sans doute raison. Ces terres grouillent d’imbéciles qui troquent un bon manuscrit pour une piécette vouer à la bibine. Longeons donc plutôt le cours d’eau, nous trouverons sans doute un autre passage."

Les bois semblaient laissés un passage entre le fleuve et nous. Mais là aussi, une embuscade était à prévoir. En réalité, le bandit ressemblait beaucoup à un animal. Une bête pouvant se cacher sous un rocher ou une souche d’arbre. Comme ces insectes rampants, qui se tapissaient en quête d’une proie pour eux. Combien en avais-je dus affronter ? A la longue, ces vauriens se ressemblaient tous, une bande d’ahuries se prenant pour les maîtres du monde, pouah !

La charrette dévia donc de son chemin, mais à peine avions nous avancer de quelques mètres, que des cris d’animaux résonnèrent jusqu’à nous. Quand je vous disais que les bandits se cachaient même sous les rochers, ce n’était pas pour plaisanter. Car comme des taupes, des humanoïdes sortirent de terre. Du moins, en laissèrent l’impression. Mais en réalité, leur manteau était recouvert d’herbes, de feuilles et de terre pour les camoufler une fois coucher à terre. Très vite, un peu moins de dix personne, recouvert de peau et de cuire, le visage masqué par une toile cousue servant de cagoule, nous encerclèrent.

"Il faut payer le péage avant haha !"

Je me mis à souffler, exaspérer.

"Du déjà vue. Lutostran c’est bien cela ? Il est temps justement, de mérité votre salaire. Je suppose que vous savez déjà, quoi faire."

J’espérais qu’au moins, tout le voyage ne se fera pas de la sorte. Aucune intention d’être interrompue tous les dix mètres par la première bande croisé. Telbara pouvait être une terre de liberté pour tous, cela n’empêchait pas la racaille de prospéré. D’ailleurs, c’était amusant ne trouvez-vous pas ? Que le peuple est des libertés ou non, ses membres choisissaient toujours la même voie, celle de la facilité. Et ils trouveront toujours des justifications. D’accord, l’éducation, l’enseignement érudit n’était pas accessible à tous. Mais si chacun se donnait les moyens, plus besoin d’attaquer les grands chemins pour vivre. La vie leur serait plus agréable.

Mais pas le temps de donner un cours à ces rustres. Au cas où, le mercenaire ne serait pas à la hauteur, je me tenais prêt à attraper le bâton et à rejoindre le combat, s’il le fallait.

Mes dieux ! Je n’en arrivais pas à croire sur quel personnage, je fusse tombé. Cet homme semblait bien aimé parler. Même au milieu de la bataille, il ne put s’empêcher de se vanter, nous accordons pour notre plus grand malheur, un petit discours. Je levais les yeux au ciel et sortis un livre, en attendant qu’il ait fini. Il fallait admettre qu’il était très fort. Un véritable Héraclès qui pouvait soulever et broyer ses adversaires avec ses grosses pattes. Au moins, il méritait par cet acte, la récompense promise, à savoir sa paye. Mise à part quelques défauts que je lui notais, il fit bien ce pourquoi on l’avait engagé, et je n’en demandais pas plus.

Enfin, sans doute devais-je m’avancer un peu trop vite. Car notre ami colosse ici présent, semblait désiré que j’intervienne. Une envie de « camaraderie » ou bien il arrivait déjà à ses limites ? Quoi qu’il en soit, cette proposition eut l’effet de m’exaspérer. Est-ce que moi, je lui demandais de lire, déchiffrer des textes anciens ou même de jouer les négociants ? Chacun son rôle quand même. Car si je venais à tout faire, à quoi bon me servirait d’engager du monde. Soufflant, je reposais le manuscrit juste à côté de moi, et m’aidai de mon bâton pour me relever.

"Si vous êtes prêt à voir vote paye se réduire."

J’étais dur en affaire. Après tout, ne serait-ce pas que pure logique ? Si je devais grignotais une partie de son travail, sa paye en compatirais. N’allons pas payer plein pot, pour un travail à peine fait. Sinon, revenons à nos moutons. Bien entendu, j’aurais aimé un pouvoir qui m’aurait permis de me débarrasser des deux derniers gêneurs. Malheureusement, à moins d’user d’un bon timing, et d’une adresse digne d’un maître assassin, il faudra se contenter d’eux un par un. Tendant ma main vers le premier, un jet de flamme sortie de ma paume. Ce crachat oranger, brûla l’air autour de lui et frappa par surprise, le visage du bandit surprit. Ce dernier hurla de plus belle. Se roulant au sol, on pouvait voir, à travers ce masque qu’il s’était créé avec ses mains, le visage partir en fumé. Une odeur de brûler remonta jusqu’à nos narines, donnant un parfum de victoire, et de sanction bien méritée.

Son comparse fut tétanisé. Ses jambes se mirent à trembler. Je pouvais imaginer que chacun de ses membres devait lui faire mal, le criant de prendre les jambes à son cou. Mais un bandit n’était pas connu pour être quelqu’un de très intelligent. Si un de ces brigands avait la moindre sagesse, choisirait une autre voie. Alors, ce petit homme se jeta sur moi, poussant un cri de guerre, qui devait être plus celui du désespoir et de la peur. Il voulait me planter avec sa lame des plus ridicule.

Le laissant faire, je le regardais foncer vers moi, ignorant mon protecteur. Et alors qu’il ne fut plus qu’à quelques centimètres de moi, un coup bien violent de mon arme, lui fit lâcher la sienne. Par réflexe, le bandit ramena sa main douloureuse contre lui, grognant de part cette souffrance. Et sans lui laisser le temps de respirer, un coup bien porter à la mâchoire, eut le mérite de le mettre à terre pour de bon. Un dernier moulinet de mon arme, je dévisageais le mercenaire.

"Voilà chose faite. Nous pouvons continuer j’espère."

Quelques piécettes… Mon pauvre ami, tu risquais d’en perdre plus à ce train-là. Soyons sérieux, pourquoi payer quelqu’un à qui vous faisais tout le boulot à sa place ? Je pouvais me montrer généreux en termes de paye, transformer un petit paysan en noble, petit prince. Mais il fallait que ce soit mérité. Je ne jetais pas mon argent par les fenêtres pour rien. Un peu comme un pacte, l’or devait se mériter contre rétribution. Chose que beaucoup de monde semblait oublier, préférant l’argent facile, plutôt qu’au dur labeur. Et ceux, qu’ils soient de classes aisées ou non, rien ne changeait de mon point de vue. Je pouvais aussi bien voir des fainéants des deux côtés.

Par contre, j’ai bien cru que j’étais au bord de la crise de nerf quand le garde du corps, me questionna sur la raison pour avoir engager une protection. Je levais les yeux en l’air, répondant de manière sarcastique :

"Vous êtes un vrai géni."

Tâchons donc de nous montrer un peu plus intelligent pour le moment. Même si je lui ai déjà expliquer sa mission, monsieur ne semblait pas assez malin pour le comprendre. Et même, si son comportement et son intellect pouvaient m’exaspérer, je savais que ce gaillard ne devait pas être mise en rogne. Après l’avoir vu assommer les bandits, et soulever pour pousser la charrette comme Hercules, il ne faudrait pas de suite le confronter dans un duel. Enfin, si chose devait arriver, je savais que j’arriverais à le battre par ruse. Ce qui ne demanderais pas plus d’un pour cent de mon esprit.

"On y va, nous avons perdu assez de temps comme ça."

C’était vrai que l’embuscade nous avait fait perdre un temps précieux. Le miens en tout cas, valait de l’or. Et c’était pour cela que ce Lustostran fut engager. Il devait gérer ces inconvénients rapidement. Je ne devais même pas lever le petit doigt pour intervenir. Sinon, en effet à quoi bon engagé une grosse brute ? Au départ certes, j’étais contre l’idée, mais si cela m’évitait de devoir surveiller constamment au-dessus de mon épaule, me permettant de consacrer toute mon intention sur mon propre travail, alors cela valait le coup.

Bon allez, calmons-nous. Accordons un Joker à ce… A notre « ami ». Peut-être que si, il y a un autre problème du genre, ce golem humain saura s’en occuper sans m’appeler à la rescousse. Serais-je devenu aussi naïf que ça ?

"Si on arrive au village avant la nuit, ce sera déjà ça de bien."

Un point positif qui pouvait aider à voir cette journée de manière plus radieuse, fut que mon simplet de garde du corps, aida à faire avancer notre affaire. Prouvant une nouvelle fois sa force, il fit traverser le chariot sur son dos. Le laissant faire, je le regardais se donnait à sa besogne. Ce qui était incroyable, fut de toujours le voir de si bonne humeur. On aurait dit, qu’il optimisait sur tout, ne voyant pas les mauvaises choses. Certains diront que c’était un trait de caractère louable. Pour moi, c’était le signe d’une naïveté. Le monde n’était pas joli, et les épreuves qu’on rencontrait, n’avaient rien à faire sourire. J’eus connu l’hypocrisie de notre monde, sa noirceur me fut dévoilée. Et je ne voyais rien à rire, ni même à sourire.

Lutostran avait fini de faire donc traverser notre moyen de locomotion et me demanda, si j’avais besoin de moi. Je suspectais une certaine raillerie dans la voix, mais il fallait mieux ne pas faire cas. Non, je n’avais pas besoin que l’on me porte. Les services qu’on désirait me rendre, me furent imposé. Sinon, je savais parfaitement me débrouiller. Et pour preuve, je tendais la main vers l’eau et me concentrai. Une partie de la surface semblait s’immobiliser. C’était une sorte de plateforme d’eau, plate, de la forme d’un disque, qui ne bougeait pas, alors que le reste de la rivière était agité. Posant le pied sur cette surface, je fus transporté de l’autre côté.

"Et bien, me voici. Je croyais que vous étiez prêt pour continuer, alors ne perdons pas de temps."

Et ainsi, nous reprenions notre route. Sauf que cette fois-ci, mes pensées n’étaient pas vouées à mes recherches, mais sur mon curieux compagnon. En réalité, ce colosse à la force prodigieuse était du genre vantard. Ces bandits rencontrés sur le chemin, n’étaient sans doute que de la rigolade pour lui. Que valait-il devant des adversaires plus puissants ? Par exemple des guerriers bien entrainés, des sorciers ou des bêtes aussi hautes que des montagnes ? Serait-il toujours aussi enjoué que maintenant ? Vue qu’il nous restait un peu de temps avant d’arriver au village, peut-être qu’un peu de causette serait le bienvenu.

"Parlez-moi un peu de vous. Vous souriez tout le temps, pourquoi ? Est-ce que votre histoire est lié à votre éternelle bonne humeur ? Sans oublier cette forge incroyable, rivalisant avec celle des minotaures ou des orcs. D’où la tenez-vous ? Est-ce un cadeau de la nature pour palier votre manque d’instruction ?"

Pour un noble, je manquais très souvent de tact, je l’avouais. Mais il ne fallait pas y voir forcément une critique, c’était plutôt une façon de parler direct, franche, ne perdant pas de temps. Sans oublier que je commençais à fatiguer, et que ces petites contraintes eurent le malheur de m’exaspérer. Donc, je pouvais bien oublier facilement les règles de bienséances. Mais rassurez-vous, je me comportais ainsi avec tout le monde, quelque soit sa position sociale.

Il était vrai que le géant était très bavard. Il devait aimer s’entendre parler, vantard, Lutostran ne devait se prendre pour n’importe qui. Toutefois, malgré son long monologue, je « dévorais ? » Ses mots ? Disons plutôt que j’analysais ses paroles, cherchant à l’étudier pour le comprendre et voir s’il y avait interprétation à travers les lignes. Le monde était rempli de tromperie, de rêveries élitistes qui bloquaient les plus honnêtes gens. Et sur ce plan, je désirais savoir où mon garde du corps se situait par rapport à tout cela. Et croyez-le ou non, mais son joli petit texte avait quelque chose de touchant. Je notais d’éventuelles points en commun entre nous deux, mais cela me paraissait en même temps banales. Et qu’est-ce qui me disait, que ce géant ne me baratinait pas ? Car je trouvais quelques paradoxes entre ses pensées, et ses actions.

"C’est une belle ironie quand même non ? J’admire votre analyse des choses, surtout que nos actions rapportent des conséquences appropriées. Mais vous dite que la haine n’apporte que la haine, la violence, la violence. Je partage ce point de vue, pourtant, vous êtes bien mercenaire, un homme verser dans cette même violence. Cela au final vous plaisait ou bien pouvez-vous changer de voie ?"

J’aurais aimé revenir sur de nombreux points de son récit, éclaircir quelques-uns, m’assurer que je ne me faisais pas déjà une idée pouvant se révélée fausse sur mon compagnon. La vérité fut que je ne désirais pas donner trop vite ma confiance envers quelqu’un et prendre pour argent contant ce qu’on me disait. Cela, j’eus déjà fait la terrible erreur par le passé. Et bien que je voulusse admettre intérieurement, que ce colosse pouvait être sympathique, malgré son arrogance, ce dernier devra prouver sa valeur, qu’il ne me faisait pas une belle chanson de troubadour, mais quand réalité, il ne valait pas tripette.

Ma question devra attendre, de mêmes les autres qui s’agitaient dans mon esprit. Lutostran voulu se montrer curieux aussi. Etait-ce aussi des questionnements me concernant, ou bien par simple courtoisie, je te pose une question, tu m’en poses une ? En tout cas, il avoua bien son côté narcissique, parler de soi, même moi j’en avais horreur, je préférais parler de mes travaux que de ma vie. Mais soit, c’était de bonne guerre, alors d’un geste fluide de la main, je l’autorisais à me questionner.

"Allez-y, posez moi les questions que vous souhaitez."

C’était drôle quand même, quand on y repenser à l’évolution de notre voyage. Au départ, je ne désirais aucun contact avec cet homme. Juste qu’il m’accompagne, me protège et qu’on rentre sain et sauf, ni plus ni moins. La sociabilisation n’était pas prévu dans le contrat et ce n’était pas ce que je recherchais. Et étrangement, nous voilà à palabrer comme deux bons compagnons de voyages. Certes, nous pouvions avoir chacun nos propres raisons de ce rapprochement, mais je ne soupçonnais aucun mauvais dessin de la part de cette brute, aussi grosse qu’une montagne.

En attendant, je demeurais curieux concernant la nature de sa demande. Que désirait-il savoir à mon sujet ? Je n’avais aucun secret d’état, un passé peu ordinaire certes, mais rien d’extraordinaire. Ce n’était pas parce que, contrairement à lui, je suis né dans un château, que ma vie était plus intéressante.

J’écoutais donc encore cette force de la nature. Et… Je devais avouer que même si je le trouvais u tantinet vantard encore, il me paraissait tout de même sympathique. Le soucie était que je ne pouvais pas trop sympathiser avec lui justement. Pourquoi ? Ce n’était pas une question d’ordre social, riche et pauvre, baron et garde. Tout cela, je m’en moquais comme de mes premières bottes. En effet, je pouvais apprécier et aimer n’importe qui, jugeant surtout sur leur cœur et leur intelligence. Cela valait bien plus qu’un grade accordait par naissance ou arbitrairement, ne se fondant sur rien. Toutefois, en l’écoutant, un rire s’échappa de moi.

"Dans ce cas, vous auriez mieux fait de devenir saltimbanque. Mais… Je comprends ce que vous me dite et je dois avouer que je partage aussi votre point de vue."

Effectivement, le fait de se battre contre ceux qui se dressaient devant vous, faisait partie de mon quotidien. Des opposants, j’en ai toujours croisé et à chaque fois, il fallait que je les affronte par la force ou l’intelligence pour en venir à bout. La liste serait bien longue, mais mes adversaires venaient de différends milieux et pousser par des mobiles tout aussi variés. Mais ceux dont je ne supportais vraiment pas, ceux qui pouvaient me faire sortir de mes gonds, furent ceux qui vinrent me mettre des bâtons dans les roues concernant mon plus grand projet. Et parlant de celui-ci, Lustostran me posa enfin sa question. Enfin, ses questions. Et effectivement énuméré ces points ne me déplaisaient pas. Donc sans tarder, je viens étancher sa curiosité.

"Permettez-moi de vous répondre dans le désordre. Pour commencer, je suis Dovamun. Baron, mais je préfère largement le titre de mage dracomancien. En effet, je suis spécialisé dans l’étude et la pratique de la magie des dragons. Et ce petit voyage que nous sommes tous deux en train de réaliser mon brave, à pour vocation de m’aider dans cette tâche. Un contact ma mise en relation avec un marchand. Ce dernier détiendrait des informations et un objet en lien avec ces rois du ciel. Et je m’y rends pour expertiser sa possession et voir oui ou non, je serais prêt à l’acquérir. Rien de plus."

Une mission tout à fait banale qui ne présentait rien de bien sorcier si vous me permettiez cette expression. Mais ce qui me préoccupait n’était pas cette quête, mais cette situation. En revenant sur notre imposant ami, je me demandais si c’était à ça, que ressemblait une véritable interaction sociale. Je ne voulais pas dire que je n’avais pas de réels amis, déjà que j’étais très sélectif, ne voulant m’entourer de n’importe qui. Mais, ceux ayant put approcher ce titre, avaient la fâcheuse tendance à disparaitre. Tout comme ce Séladien, dont le fait d’évoquer son nom me fit autant bouillir qu’un dragon en colère, qui sans prévenir, avait quitté le domaine alors que je croyais que nous nous entendions bien. Nous étions collègue et ami je pensais. Sinon, il restait Garrett, le chef de la sécurité du château. Pas amusant, assez strict, mais fidèle ayant toujours veillé sur moi depuis ma tendre jeunesse. Et question amour, je n’avais pas encore trouvé la perle rare. Tout ceci me poussa à poser la question suivante à mon nouveau protecteur :

"Et vous sinon ? Vous avez de la famille quelque part ? Des amis à retrouver une fois votre tâche terminée ?"

Croyez-le ou non, mais je commençais à éprouver une véritable sympathie pour ce gaillard. Sans aucun doute vantard et trop optimiste, qui devait bien vous taper sur les nerfs au bout d’un moment. Mais il avait tout de même une personnalité pouvant être attrayante. Et puis, le caractère que j’avais, je concevais parfois qu’il n’était pas toujours évident non plus, n’avait rien à voir avec lui. Juste une lingue succession de déception, de trahison, de bâton dans les roues… Bref, de nombreux épisodes bien sombres m’ayant poussé vers le cynisme. Car si je pouvais faire regretter à quelqu’un ses actions, ce ne serait sans doute pas Lutostran. Pour le moment, le colosse ne m’avait rien fait de mal jusque-là, et j’espérais que cela durerait.

Je fus bien peiné aussi d’entendre dire que le côté familial, n’allait pas si joyeusement que cela. Même si mes parents pouvaient m’expassées, je tenais à eux et me vis mal les abandonner ou les jeter dehors. Et que pouvait bien être ce secret ? Ne jamais dire qu’il y avait un secret, car tout le monde aimerait le savoir, et moi le premier. Etant un érudit, la curiosité fut la première de mes nombreuses qualités. Toutefois, je préférais respecter sa décision et ne pas revenir sur le sujet. Un jour il m’en fera peut-être la confession, mais cela pouvait attendre le temps qu’il lui plaira, voir jamais si le cœur lui dictait ainsi.

"Si justement, regardez ! Le bourg est juste là !"

En effet, on pouvait voir au loin, le sommet de nombreuses chaumières. Nous y approchions c’était parfait. Dans pas longtemps, je pourrais juger si l’annonce qu’on m’avait fait, était sérieuse ou pas. Dans le cas où ce ne serait le cas, croyez le bien que ma colère sera aussi puissante qu’une tempête de feu. Et même la force prodigieuse de Lutostran ne pourrait rien y faire pour l’en empêcher. Mais bon, restons tout de même logique. Les chances pour que les informations soient juste et utilisable, restèrent très mince, voir nul. Les pièges des charlatans restaient nombreux. Alors je me préparais déjà mentalement à donner quelques coups.

Nous arrivions finalement à destination. Et si vous vous attendiez à un petit village pittoresque, vous vous tromperiez. Alors oui, il pouvait y ressembler, mais il était plus proche d’une agora que d’un hameau. Ce coin servait beaucoup aux échanges des zones d’agglomérations voisines et donc, chaque maison qu’on pouvait voir, était aussi un atelier ou une boutique. Une vraie petite zone commerciale, protégé par une milice locale. Et qu’est-ce qu’on y vendait ? Un peu de tout, sauf de la nourriture, enfin très peu. Les biens proposés étaient surtout des objets décoratifs, des outils, des meubles, parfois même des armes, des vêtements… Mais les besoins primaires non. La nourriture s’obtenait surtout auprès de boulangerie se tenant aux extrémités de la zone, ou bien se vendaient carrément à l’extérieur.

Tentant de traverser la foule compacte qui remplissait ce village de marchand, je soufflais à l’intention de mon compagnon :

"Restez sur vos gardes. On ne sait pas sur qui nous pouvons tomber."

J’aurais aimé une entrée en toute discrétion. Contrairement à beaucoup de ceux de mon niveau social, je n’appréciais guère attirer l’attention sur moi. Se pavaner, crier sur les toits sa situation, qui on était, ou dévoiler sa « puissance » n’était pas mon genre. Alors, quand Lutostran se mit à crier haut et fort, mettant en garde qui conque de ne pas se mettre sur son chemin, je fus assez choqué. Nous n’étions pas des voleurs ou des assassins, mais éviter d’attirer les regards m’aurait été préférable. Un peu plus et j’allais rouster ce géant de sa bêtise, mais très vite, je compris ce qu’il avait en tête.

En réalité, ce fut ma faute. J’avais souvent la fâcheuse idée de surestimer les gens. Qu’il soit paysan ou noble, chevalier ou voleur, humain ou non, tout le monde se laissait facilement aveugler par les apparences. Donc, au lieu de voir un homme possédant une fortune sur lui, ils seront plus concentrés sur la brute pouvant les broyer d’une seule main. Un coup d’intimidation en quelque sorte. Cela pouvait paraitre risqué, mais judicieux également. Décidément, ma vision de ce solide gaillard changeait peu à peu. Et de manière positive en réalité. Bien qu’il soit trop vantard à mon goût, Lutostran pouvait se montrer malin en plus d’être de compagnie joviale. S’il s’intéressait ne serait-ce qu’un peu à la lecture et l’érudition, je pense que j’aurais pus me faire, un très bon ami.

"Très bien. Je vous fais pleinement confiance Lutostran. Le bien-être de cette expédition dépend de vous."

Ainsi, nous nous engouffrions sur la place du marché. Comme raconter avant, les denrées étaient rares, mais on vendait beaucoup de biens tape-à-l’œil. Des colifichets, allant du bijou au jouet. Des vêtements aussi avec souliers, tuniques et capuches. Niveau armement, il n’y avait pas grand-chose, surtout des couteaux, dagues ou des armes contendantes. Toutefois, aucun livre en vue, aucun objet soi-disant magique. Cependant, je n’étais pas venu faire mes emplettes. Sachant déjà ce que je désirais et où le trouver, nous nous dirigions directement vers cet endroit. Pourtant, je ne pus m’empêcher de signaler à mon garde du corps temporaire :

"En revenant, si quelque chose vous tente, vous pourrez vous faire un petit plaisir."

Bien que dit sur une note d’humour, j’étais sérieux. Pourquoi voulais-je me montrer si sympathique avec lui en réalité ? Il ne correspondait pas vraiment aux genres de personnes avec qui je voulais fréquenter. Je favorisé les personnes intellectuelles, qui aimaient le savoir, qui le rechercher, des gens sages et ayant du bon sens. Très bien, je voulais bien avouer que rencontrer ce genre de personne justement, n’étais pas facile. Car la plupart des gens que nous disions être érudit, n’était pour moi que des imbéciles, des charlatans jouant au magicien, envoûtant les gens avec de belles paroles n’ayant aucun sens. Et puis en même temps, j’eus toujours du mal à me faire des amis. Le dernier que je me suis fait, n’était pas sortie des grandes écoles. Mais c’était un homme amoureux de la connaissance, cherchant à comprendre, curieux et ayant ce bon sens que j’appréciais. Nous étions devenus collaborateurs pour nos recherches respectives. Une belle équipe dans laquelle je me sentais bien. Mais voilà… Sans prévenir, il était parti. Du jour au lendemain, il s’en était allé, crachant sur l’aide que je lui apportais. Une séparation, dont j’eus encore du mal à me remettre.

Et concernant l’amour ? Et bien, je n’avais pas rencontré la perle unique. Déjà, ce n’était pas dans mes projets et j’y pensais que rarement. En quoi cela m’aiderait dans ma vie et mes recherches ? Différenciant encore de ceux de mon « niveau », je ne cherchais pas la meilleure partie. Les titres de noblesses ne m’attiraient pas. Ce que je cherchais à faire grossir, n’était pas les terres et la fortune mais la connaissance. Si je rencontrais une femme aussi érudite que moi, voir plus, oui je pouvais en tomber amoureux.

Nous arrivions donc près de notre marchand et informateur. Sa bicoque était charmante, la porte en bois était ouvragée, et les fenêtres grillages, dissimulaient ce qui se passait à l’intérieur. Quelques plantes trônaient sur les rebords et au-dessus de la porte, donnant un aspect plutôt féerique. L’homme devait bien vivre. Mais, ce fut en frappant à la porte que nous eûmes une belle surprise. Sous le premier coup, cette dernière s’ouvrir doucement, n’étant pas verrouillé, dévoilant un intérieur plongé dans la pénombre. Intrigué, je me penchais vers l’intérieur, appelant le propriétaire.

"Yulrik Depasse ? Vous êtes-là ? C’est votre correspondant."

Pas une voix, pas un son ne revenait en guise de réponse. Je fus tenté de m’engouffrer pour fouiller et retrouver le bonhomme, mais un second détail m’alerta. L’examinant, je le fis remarquer au garde du corps.

"La porte à était forcé."

Déjà que mon compagnon ne passait pas inaperçu à cause de sa taille, brailler dans tous les sens n’aidait surement pas. J’exigeais discrétion pour cette opération, et vue que cet homme avait un accoutrement proche du peuple, cela aurait put servir, mais visiblement non. On pouvait sentir un millier de regard se posaient sur nous discrètement. Mon cher Garret, responsable de la sécurité et capitaine de la garde du domaine, aurait finalement fait mieux l’affaire. Certes, il tapait dans l’œil avec son armure rutilante, mais il savait garder sa langue dans sa poche, et non jouer les gros animaux comme dans un spectacle d’ours.

Ceci-dit, le colosse prit les devant, voulant passer devant moi dans la maison de mon correspondant. Action louable, au mérite de son métier et dont je laissais faire. Mais il fallait croire que la mémoire ne durait pas longtemps avec moi, fus-je violemment ramené dans la réalité lorsque Lutostran se remit à hurler comme un lion dans toute la maison. Il était sans doute judicieux de vérifier si oui ou non, un quelconque danger rodait encore dans les parages, mais sa méthode paraissait quelque peu exagérer.

"Les voici donc avertis. Et avec votre beau discours, ils ont eu le temps de se cacher ou prendre la fuite je présume."

Ce géant semblait toujours vouloir en faire trop. Pourquoi ? Je supposais que dans son milieu, il était important de soigner son image pour assurer de futurs clients, impressionner par ses prouesses. Cela devait fonctionner auprès du commun des mortels, mais moi j’étais charmer par la qualité du travail et des arguments. Les artifices n’étaient bons qu’aux spectacles de saltimbanques, des théâtres ambulants pendant les foires. Là, je croyais vraiment assister à un spectacle monter de toute pièce, me faisant une fois de plus douter de l’efficacité du mon nouveau garde du corps.

"Et si nous allions enquester ? En cas d’une flèche décocher, je suis sûr que vous prendriez plaisir à la prendre au genou à ma place." Proposais-je sur un ton calme, mais non dénuder de cynisme.

Emboitant le pas, j’entrais dans le repère de Yulrik Depasse. On aurait dit un entrepôt de bric et de brac. De nombreuses étagères éparpiller, abritant aussi bien vieux livres que bibelot en tout genre. Quelques désordres par ici et par-là, mais je suspectais davantage un manque d’organisation qu’un véritable cambriolage. L’odeur sentait le renfermer, la poussière et l’humidité. Autant dire que c’était très lourd et donnait envie de presser le pas. Au moins, je ne ressentais aucune odeur de sang, ni sentir la moindre once de magie, voici donc deux dangers en moins.

"Faites donc le tour je vous pries et voyez ce que vous pouvez trouver. Avec un peu de chance, vos braillements n’auront fait fuir tout le monde et nous pouvons encore trouver quelqu’un à questionner. Sinon, cherchez toute chose ayant à faire avec notre affaire, tout ce qui aura pour référence les dragons me sera fort utile."

Ayant droit à une seconde paire de bras, le garde du corps ne sera pas de trop. Si Yulrik avait effectivement quelque chose concernant mes recherches, un objet ou une note sur le sujet devait se trouver ici. Après, il demeurait le risque que notre ami se soit enfui avec tout cela. Mais alors, je ne vie pas l’intérêt de me faire traverser la région pour rien.